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LE SEXE SELON MAÏA
Dans le monde d’avant, les choses étaient bien organisées. Les anciens accumulaient de l’expérience qu’ils passaient aux jeunes et cette transmission générait d’immenses réussites telles que Notre-Dame ou la tarte Tatin. Manque de chance : pour la pratique sexuelle, ça ne marche pas. Les fantasmes se transmettent, mais pas les gestes. A cause des tabous, il n’y a souvent pas de transmission du tout. On pourrait même affirmer que la pratique sexuelle appartient à une culture qui s’écrit sur de l’eau et qui, en conséquence, doit constamment réinventer la roue.
Grâce ou à cause de ce manque de transmission, il n’y a aucune raison qu’un jeune amant soit meilleur qu’un vieil amant. Le jeune aura peut-être des érections plus spectaculaires, mais il manquera d’expérience… sauf qu’aujourd’hui, justement, l’expérience a cessé d’être un phénomène linéaire. La production de contenus pédagogiques liés à la sexualité a explosé et cette déferlante s’adresse en priorité aux plus jeunes.
Cette médiatisation produit une terrible injustice : en 2024, il y a de fortes chances qu’un homme de 25 ans soit mieux informé qu’un homme de 65 ans. Quand je parle d’informations, il ne s’agit d’avoir lu Sade ou traîné ses guêtres dans quelques lieux malfamés. Il s’agit de la lecture de livres consacrés à la sexualité, du suivi de comptes spécialisés sur les réseaux sociaux et, bien sûr, d’un intérêt pour le point de vue des femmes (copines, mères, sœurs). Car, contrairement à ce que laissent entendre les plus virulentes critiques adressées à la nouvelle génération de jeunes hommes, qui seraient d’horribles masculinistes, nombre d’entre eux se sont construits, non pas contre, mais avec #metoo.
Les plus motivés rejoignent diverses instances du mouvement sexe positif (abrégé en « sexpo ») – ce qui signifie qu’ils considèrent la sexualité comme suffisamment chouette pour s’y intéresser au-delà de la simple consommation. Les événements et collectifs sexe positifs permettent de se confier, de débattre, d’expérimenter des pratiques érotiques, dans des cadres inclusifs et bienveillants. On y invente les savoir-faire et savoir-être d’une sexualité respectueuse.
C’est habituellement dans ce genre de lieux qu’on trouve son amant « sexpo ». Il se reconnaît au premier coup d’œil : bien élevé, attentif au désir des femmes, il redouble d’efforts pour séduire. Bien qu’il ne soit pas né avec un capital génétique plus généreux que la moyenne, il a réfléchi aux questions d’hygiène, de pilosité, de décoration corporelle, de vêtements et d’attitude. Il a une opinion sur son sillon interfessier et sur la taille de ses ongles. Bien qu’il existe autant de versions de jeunes hommes « sexpo » que de préférences ou de morphologies, il est impensable qu’ils ressentent de l’indifférence quant à leur propre apparence.
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